Une mode éthique et durable pour une consommation plus responsable, avec un design dans l’air du temps adapté à la vie urbaine, c’est désormais possible. Urban BEAST a rencontré Marie Viard Klein, fondatrice de la marque de maroquinerie Minuit sur Terre, qui propose des chaussures et sacs à main en « cuir vegan » ou plutôt sans cuir. Explications.

Une démarche globale, honnête et transparente

« En France, nous n’avons pas le droit d’utiliser le terme cuir s’il ne s’agit pas de peau animale », explique tout d’abord Marie Viard Klein. Celle-ci a vu le jour en 2016, alors que la fondatrice de la marque de maroquinerie bordelaise Minuit sur Terre était encore étudiante, grâce au statut français étudiant-entrepreneur, permettant de consacrer son stage de fin d’étude à un projet entrepreneurial. C’est en effet durant l’été, alors qu’elle avait pris la décision de renoncer aux produits d’origine animale quelques années auparavant, que son idée est née. Son constat, à l’issue d’une séance de shopping infructueuse : il existait bien des souliers vegan, donc les matériaux et les ateliers capables de les travailler, mais le design n’était pas au rendez-vous.

« J’ai voulu au plus vite confronter le produit au marché, j’ai rapidement trouvé des ateliers qui voulaient bien fabriquer, et pour les matières cela a été beaucoup plus facile que ce que je pensais. J’ai lancé le crowdfunding début 2017, et nous avons vendu 320 paires en 3 semaines ! J’avais la preuve que le produit plaisait vraiment », ajoute Marie, qui reconnait volontiers avoir lancé le bon produit, au bon moment, avec la bonne stratégie de communication.

C’est d’ailleurs ce qui fait le succès de ses produits selon elle, et pas seulement sur un public vegan. Ce succès est aujourd’hui encore au rendez-vous, avec plusieurs collections femmes sur l’année – qui représentent 80% de la clientèle – et une collection hommes permanente apparue plus récemment.

« On ne fait pas un projet comme celui-ci à moitié » nous dit la fondatrice de la marque de maroquinerie, « dans la mode, pour beaucoup de produit, il n’y a aucune traçabilité ; au mieux on sait où le vêtement a été fabriqué », c’est pourquoi la marque qu’elle a créée s’inscrit dans une démarche honnête et transparente : tous les composants des textiles sont indiqués sur le site de Minuit sur Terre sur chaque fiche produit.

De nombreuses alternatives au cuir, mais des techniques encore expérimentales

« C’est très compliqué pour les marques qui ont une démarche végane d’expliquer en quoi sont faits leurs produits sans utiliser le terme cuir » continue Marie Viard Klein. Pourtant, les matériaux utilisés sont connus de tous : le Piñatex à base d’ananas et originaire d’Espagne qui donne une matière très semblable au cuir à l’aspect fripé, le Muskin, venant d’Italie, à base de champignons, qui permet la fabrication d’un textile à l’apparence similaire au nubuck, ou encore l’eucalyptus (Allemagne), la pomme (Pays-Bas), le cactus (Mexique), le thé kombucha (Etats-Unis), mais mes techniques de fabrication restent encore à améliorer.

Les produits Minuit sur Terre quant à eux sont fabriqués dans des ateliers familiaux de la région de Porto, au nord du Portugal. « Aujourd’hui la semelle et la doublure sont réalisés à base de viscose provenant de céréales, notamment les germes et l’enveloppe du blé, et l’extérieur est pour l’instant composé de matières synthétiques », souligne la fondatrice. La marque sera par ailleurs l’une des premières au monde à utiliser un tout nouveau textile à l’apparence du cuir, fabriqué à base de déchets viticoles. « Toutes nos baskets blanches et tous nos sacs noirs, les basiques qui représentent le plus gros de nos ventes, seront réalisés en cuir de raisin, à partir du mois de mars 2020 », ajoute sa fondatrice.

« Tout ce qui n’est pas du cuir est beaucoup plus compliqué à travailler pour les ateliers. Les contrôles qualités sur le produit fini sont plus importants, il faut former les équipes, donc on y passe plus de temps », nous confie Marie Viard Klein.

Les processus de fabrication des articles en matière végane coûtent donc plus cher, cependant elle a vu une évolution depuis le début de son aventure, et des conventions pour le travail de ces matériaux sont même organisées au Portugal pour former le personnel par exemple.

Greenwashing, restez vigilants « Produire des souliers vegan peut être très bon marché, en achetant par exemple des textiles à base de plastiques non-éthiques et en faisant fabriquer dans un pays où la main d’œuvre est peu chère. Mais on n’est alors plus dans une démarche écoresponsable », commente la créatrice. Si l’on souhaite consommer plus responsable, il faut alors rester vigilant. En effet, le terme « cuir végétal » est par exemple un raccourci utilisé pour désigner un cuir d’origine animale traité à l’aide de tannins végétaux. Prudence donc lors de votre prochaine virée shopping végane.