BIARRITZ LE 22 MAI 2018 Louis-Romain Plumerault et Nathalie ont créé Terre Permaculture

Rencontre avec Nathalie Bacque (horticultrice et éco-paysagiste) et Louis-Romain Plumerault (ingénieur en Sciences de l’Eau et de l’Environnement et docteur en Physique), co-fondateurs du bureau d’études Terre Permaculture, qui concentre ses efforts sur la promotion d’un aménagement urbain dans l’air du temps ainsi que sur la transition agricole. Ces nouvelles architectures urbaines s’orientent vers une gestion durable des ressources, comme l’énergie, l’eau et les déchets, et proposent des espaces de vie naturels qui créent du lien social autour de l’échange, du ressourcement et du bien-être. Elles ont donné lieu à la création de la permaculture.

Quelle est votre définition de la permaculture ? Quels en sont les principes clés ?

Le mot «permaculture» est dorénavant bien connu du grand public, parce que très médiatisé ces dernières années en Europe. En revanche, il y a parfois quelques confusions sur ce que dont il s’agit vraiment. Du coup, nous avons pour habitude de redéfinir la permaculture en nous appuyant sur ses fondateurs : la permaculture est une science du design éthique qui biomime les systèmes naturels pour créer des écosystèmes productifs et résilients.

Ce n’est donc pas une technique ni un ensemble de techniques mais plutôt une science consciente et soutenable de la conception. Il s’agit d’un ensemble de principes, fondé sur l’éthique, au cœur duquel se trouve la notion de soutenabilité : c’est-à-dire qu’un système soutenable est un système qui, sur sa durée de vie, produit plus d’énergie qu’il n’en faut pour le créer et le maintenir.

A qui s’adresse-t-elle ? Peut-elle s’adapter à des besoins et/ou environnements spécifiques ? Comment ?

La permaculture s’adresse à tous. Aux particuliers qui souhaitent devenir plus autonomes et produire leur nourriture, soutenir les grandes causes que sont la biodiversité et le climat, et ce, même en ville.

Aux agriculteurs bien sûr, qui souhaitent transiter vers un mode de culture au-delà du bio, encore plus respectueux de l’environnement et conduisant à une meilleure santé des hommes et de l’écosystème ainsi qu’aux institutions et territoires, qui souhaitent insuffler et incarner le grand mouvement de transition sociétale qui s’impose aujourd’hui, en ramenant la production près de là où les gens vivent, les villes, pour des circuits «très» courts.

Aussi, il est important de noter que la permaculture s’applique à la production de denrées alimentaires bien entendu, mais aussi à l’habitat pour concevoir des habitations qui produisent de l’énergie et des habitants heureux. Elle s’applique également aux organisations pour mettre en place des structures humaines enrichissantes, fonctionnelles et épanouissantes.

Plus concrètement, quels en sont les bénéfices ?

Les bénéfices sont très nombreux. Nous avons listé les grandes causes que notre activité soutient, comme des effets secondaires désirables des écosystèmes que l’on implémente.

Nous avons appelé cela les «grands enjeux». Il s’agit de :

La production de nourriture en circuit très court : ramener la production d’aliment près de là où les gens vivent, c’est-à-dire dans ou près des villes, en situation urbaine ou péri-urbaine.

La biodiversité : parce que les écosystèmes permacoles sont un habitat idéal pour la vie sous toutes ses formes : animale, végétale, fongique, microbiologique, etc.

La régénération des sols : enjeux écologique majeur, et souvent mal compris, il est urgent de prendre soin de cette fine pellicule de sol arable qui recouvre la terre et nous permet de produire notre nourriture.

La santé avec la densité nutritionnelle : puisque dans un sol avec beaucoup de microbiologie, à l’origine de sa fertilité, les fruits et légumes sont davantage riches en nutriments, comme les fruits de la jeunesse de nos grands parents !

Le lien social et l’éducation : le retour à la Terre est fondamental pour créer du lien et du bien-être social, on le voit d’ailleurs aux visages des gens qui s’illuminent en découvrant nos écosystèmes. Le besoin de nature est nourri : les gens ont envie de le partager. De plus, la nature est un contexte pédagogique très puissant au sein duquel enfants et adultes retrouvent la joie de connaître et prendre soin de leur environnement intérieur et extérieur.

La positivité carbone : au-delà de la neutralité, nous piégeons du carbone parce que nous plantons beaucoup d’arbres et d’arbustes.

La qualité de l’air : l’air est nettoyé de ses polluants par la richesse végétale des écosystèmes permacoles.

La qualité de l’eau : l’eau qui passe par nos systèmes est filtrée par de la terre très riche en micro-vie.

La permaculture répond donc à ces nombreux challenges, actuels et globaux, raison pour laquelle les territoires s’intéressent désormais de plus en plus à cette science. En effet, la perte de sol, le climat, la conjoncture sociétale… conduisent les territoires à se tourner vers une solution soutenable, sobre et low-tech, applicable du milieu rural au milieu très urbain : la Permaculture !

Quels sont les prérequis pour les territoires, mais aussi entreprises ou individus, avant de se lancer dans la permaculture ?

Il n’y a aucun prérequis… si ce n’est lire cette interview (entre-autres) attentivement et surtout avoir bien compris ce qu’est vraiment la permaculture. Ensuite, il s’agit de trouver un bon designer ou une bonne équipe de designers et d’aller dans le process de design sereinement, pour appliquer les principes écosystémiques aux questions de la production, de l’habitat et des organisations, et converger vers une solution holistique, fonctionnelle et soutenable, pour produire nourriture et énergie en abondance, près ou dans les bassins de vie.